Exercice du blog au 4 avril 2014 :

Canicule de l'été 2013 à Prague, j'ai demandé (dans un anglais pourri) à la serveuse de la taverne où je me suis arrêté pour me désaltérer, l'autorisation de la prendre en photo au prétexte quelle arbore une superbe chevelure.

Observons la composition.
Si on prend en considération la règle des tiers, on a 2 points significatifs A et B :
En haut à droite (A) les cheveux impeccablement tirés, le regard du spectateur suit la tresse présentant un imperceptible désordre pour arriver, en bas à droite (B) aux pointes qui ondulent sur l'épaule. Je dirais :
« Ah ! non ! c’est un peu court, jeune homme !
On pouvait dire… Oh ! Dieu !… bien des choses en somme ! »
Pour conter une histoire, il faut modifier la composition et d'autres erreurs.
Une image vaut mille mots (pas 3).

1) En premier lieu il est préférable de ne pas laisser d'espace au dessus de la tête, et dans le dos. Il est même possible de couper légèrement les courbes sans gêner le regard (le cerveau du spectateur reconstitue aisément la partie manquante).

 

On obtient ainsi un cadre carré, très classiquement employé pour le portrait. Entre nous, c'est une des compositions que je préfère, ça reste très académique mais...
Ah, les règles de l'art, les codes,  il ne faut pas s'effrayer de s'en écarter de temps en temps,  pour en raconter un peu plus.

2) En suivant le trajet œil – crayon – verres (alignés sur le meuble du fond), on relate un peu plus la vie cette jeune femme. Le trajet est même suggéré, par anti-symétrie, à celui de sa chevelure. Pour mettre les points forts (l'oeil et le crayon)  aux croisements des tiers, on aboutit à un cadre vertical, laissant apparaître un peu mieux la poitrine sans pour autant en dévoiler plus puisqu'on voit déjà parfaitement les limites de son décolleté.

3) Ah, les fonds flous pour les portraits...
Ben comme ça, on ne sait même pas si elle va nous servir une bière ou un croissant chaud! Parfois, il arrive qu'un peu de netteté au fond soit utile.

4) Mais aurait-on pu choisir le cadre, immédiatement à la prise de vue ?
Impossible, bien sûr,  notre serveuse n'est pas un modèle qui pose, elle s'active rudement. La solution est de toujours cadrer un peu large, pour ensuite choisir finement celui qui convient le mieux à la lecture de l'image. Pour aller vite, j'ai laissé un cadre épais approximatif, le définitif  se situe dans cette zone.

5) La dé-saturation partielle, c'est peut être joli, mais qu'est ce que ça fait plagiat. N'y a-t-il donc rien d'autre à faire ? Une rousse a la peau soit trop blanche, soit tachetée. Il y a 2 alternatives : soit la peau blanche est floutée pour symboliser un caractère évanescent, soit on renforce la netteté des taches de rousseur pour souligner un caractère piquant. C'est tout aussi simple à faire à la retouche, lorsqu'on a pas le temps de le faire à la prise de vue.
Ce genre de manipulation ne doit pas être considéré comme une tricherie, c'est simplement le point de vue du photographe sur la personne. Quand vous prenez une photo, c'est votre point de vue, votre opinion.

6) Et la sur-saturation des couleurs, quelle horreur ! On dirait presque un sapin de noël. Tout le contraire de sa personnalité : visiblement, elle est coquette mais tout en retenue, avec un maquillage confidentiel et des bijoux sobres, discrets ou modestes.

7)  Oublier de remercier notre charmant modèle de son aimable collaboration :)

 

En fait, aucune loi n'interdit de faire n'importe quoi. C'est juste que ce n'est pas très sympa de donner la nausée à ses compatriotes sous pretexte de concept artistique.


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